
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir
L’ampleur actuelle de la crise de l’itinérance à Montréal est sans précédent. De plus en plus de personnes se retrouvent en situation d’itinérance, ce qui entraîne souffrance et vulnérabilité. En parallèle, les enjeux de cohabitation sociale sont exacerbés.
Face à cela, il y a un an, la Ville de Montréal a confié à l’Office de consultation publique de Montréal (l’OCPM) le mandat de mener une consultation publique sur la cohabitation sociale et l’intégration de ressources en itinérance à Montréal. Après 10 mois de consultations et des milliers de personnes rejointes, l’OCPM vient de publier un rapport exhaustif et essentiel, contenant des recommandations à appliquer dès maintenant et destinées aux pouvoirs publics et à la population. La Mission Old Brewery est en première ligne de la crise, et ce, au quotidien. Nous adhérons aux constats et aux recommandations de l’OCPM, qui reflètent fidèlement la réalité que nous observons sur le terrain.
D’abord, l’OCPM rappelle un fait essentiel : les personnes en situation d’itinérance à Montréal sont des citoyens et des citoyennes au même titre que tous et toutes les autres. Elles jouissent des mêmes droits, y compris celui d’habiter la ville dans la sécurité et la dignité. De fait, la Ville doit modifier son approche dans l’espace public, en l’aménageant de façon inclusive et en fournissant des services de base accessibles à tous et à toutes (notamment des toilettes publiques, la collecte des déchets, l’accès à l’eau potable et des espaces de rangement sécurisés). L’OCPM explique aussi que démanteler des campements sans offrir de solutions de alternatives expose les personnes vulnérables à plus de précarité et risque d’accroître les enjeux de cohabitation. Démanteler les campements ne fait que déplacer l’itinérance. Ces conclusions sont d’ailleurs en parfaite cohérence avec le rapport publié en janvier dernier par un comité d’experts créé par la Ville de Montréal qui traitait des campements.
Ensuite, l’OCPM explique que, sans une clarification des rôles et des responsabilités des trois ordres de gouvernement, sans une meilleure gouvernance et sans leadership affirmé, nous ne pourrons résoudre la problématique de l’itinérance ni, par extension, les enjeux de cohabitation. Une collaboration sans faille entre les parties prenantes sera la clé du succès.
Autre aspect fondamental : les organismes communautaires souffrent de sous-financement chronique. Face aux besoins grandissants en itinérance, un rehaussement significatif et une refonte des programmes de financement sont indispensables pour résoudre la crise. Les trois ordres de gouvernement doivent faire du logement une priorité et allouer de manière urgente un financement adéquat pour la construction d’un continuum de logements abordables. Enfin, la prévention de l’itinérance doit également être le socle de l’action gouvernementale, s’avérant beaucoup moins coûteuse que les dépenses importantes requises une fois la personne dans la rue.
Malgré l’impuissance que beaucoup ressentent, les solutions existent. Elles sont désormais connues. Il revient maintenant aux pouvoirs publics de profiter du travail considérable réalisé par l’OCPM et de faire de la résolution de la crise de l’itinérance une priorité absolue. La prise de conscience collective que nous observons l’exige.
Ainsi, comme le résume avec justesse la présidente de la commission de l’OCPM, Ariane Émond, « l’intolérance de certains face aux personnes en situation d’itinérance pourra devenir une intolérance collective face à l’itinérance, pavant la voie à la diminution de cette dernière, et conséquemment, aux enjeux de cohabitation qui en découlent. »
C’est toute la société qui en bénéficiera.
William Hodgson
Conseiller principal aux Affaires publiques et relations gouvernementales de la Mission Old Brewery