Services d’urgence 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 Hommes : 514 798-2244 | Femmes : 514 526-6446

Logement social et communautaire : Préserver pour prévenir l’itinérance

29 mai 2024
James Hughes
Photo de la résidence « Voisines de Lartigue », un logement exclusivement dédié aux femmes.
i

Voisines de Lartigue est un projet de relogement réservé aux femmes.

James Hughes, président et chef de la direction de la Mission Old Brewery, signe une lettre d'opinion dans Le Devoir sur l'importance des logements sociaux et communautaires, alors que la population itinérante de la ville de Montréal a atteint les 5 000 individus au courant des dernières années.

Les nouvelles récentes dans le secteur de l’itinérance ne sont guère réjouissantes. Deux mille personnes se sont ajoutées à la population itinérante montréalaise entre 2018 et aujourd’hui, qui est passée de 3000 à 5000 individus. L’impact de la pandémie est donc bien réel. Les incidences de surdose dans nos services d’urgences sont aussi en forte croissance, nécessitant l’utilisation de naloxone presque quotidiennement. De plus, le phénomène de l’itinérance absolu (soit la présence de personnes dormant dans les parcs, les entrées de commerces et les rues) est de plus en plus répandu.

La cause ? La crise du logement, en grande partie. Entre 2016 et 2021, le Québec a perdu 115 000 logements de 750 $ par mois ou moins, dont 89 000 à Montréal. Le taux de vacance des logements abordables tourne autour de 1 %. Quant aux loyers des chambres et studios modestes, ils ont augmenté de 8 % depuis l’an passé.

Le marché locatif est sous pression, ce qui provoque une multiplication des évictions et, en conséquence, une hausse de l’itinérance. Selon le dernier dénombrement, 22 % des personnes nouvellement en situation d’itinérance ont été évincées de leur appartement. Celles qui fréquentent nos services d’urgence ou se retrouvent dans la rue ont moins d’options pour les mêmes raisons qu’elles ont perdu leur foyer : la crise du logement.

Mais même si ces constats peuvent paraître décourageants, il y a lieu de rester optimistes. Voici pourquoi :

  • Le gouvernement fédéral a annoncé le plus ambitieux plan de logement qu’ait connu le Canada depuis les années 1970. Ciblant presque quatre millions de nouvelles unités de logement d’ici une décennie, la mise en œuvre du plan pourra augmenter radicalement le nombre d’unités abordables à travers le pays et, élément clé du plan, protéger le parc de logements abordables existant. Doté d’une enveloppe de 1,5 milliard de dollars en subventions et prêts, le Fonds de protection des loyers a été créé pour aider les fournisseurs de logements abordables à acquérir des propriétés et à maintenir des loyers stables sur le long terme, afin d'éviter que ces logements ne soient convertis en condos inaccessibles ou en logements de luxe, a annoncé la ministre des Finances Chrystia Freeland, lors de la présentation du dernier budget fédéral.

  • Le gouvernement québécois vient de déposer un projet de loi pour interdire les évictions pendant une période de trois ans ou jusqu’à ce que le taux d’inoccupation dépasse les 3 %. Elles seront interdites pour les changements d’affectation, les subdivisions ou les agrandissements de logements. Le projet de loi propose aussi de mieux protéger les locataires aînés, en interdisant l’éviction de personnes à faible revenu de 65 ans et plus (comparativement au seuil actuel de 70 ans) et en haussant le revenu d’admissibilité. Voilà une excellente nouvelle pour les ménages plus vulnérables.

  • Après avoir fait l’objet de critiques, le Programme d’habitation abordable québécois (PHAQ) a été assoupli afin de mieux s’adapter au marché locatif actuel. La Mission Old Brewery a pu récemment obtenir une subvention importante du PHAQ pour acquérir une maison de chambres de 46 unités sur le Plateau Mont-Royal. Cela permettra de protéger l’abordabilité de ces lieux à long terme, d’apporter aux locataires les services de soutien dont ils ont besoin et de réduire le risque l’itinérance de manière significative.

  • À ces mesures s’ajoute le règlement pour le droit de péremption adopté par la Ville de Montréal, il y a deux ans. Ce règlement permet à la Ville d’acquérir en priorité sur tout autre acheteur des terrains ou des bâtiments, notamment pour réaliser des projets au bénéfice de la communauté. Depuis l’entrée en vigueur de ce règlement, plus de 100 maisons de chambres ont été assujetties au droit de péremption. Les propriétaires de ces maisons de chambres doivent donc faire parvenir à la Ville un avis concernant leur intention de vendre leur immeuble, avant d’accepter une offre d’achat. Montréal a été la première municipalité au Québec à se doter d'un tel mécanisme. La Old Brewery est fière de gérer deux des bâtisses acquises par la Ville grâce à cette disposition, ce qui nous permet de mettre notre expertise au service des personnes qui y demeurent.

  • La Ville de Montréal a aussi créé un comité de réflexion multisectoriel sur la question épineuse des personnes en situation d’itinérance qui vivent dans les espaces publics. Les travaux du comité peuvent mener à l’adoption par la Ville et ses partenaires de mesures, ainsi que de services structurés et proactifs, afin de faire face à ce phénomène.

Les organismes sans but lucratif œuvrant dans le secteur d’itinérance sont tous en mode expansion afin de faire plus et mieux. Nous tentons de renverser l’importante progression du nombre de personnes sans-abri ou à risque de l’être dans notre ville. Les trois ordres de gouvernement semblent être, plus que jamais, au rendez-vous. Mais ce n’est qu’un début.

Inscrivez-vous à notre infolettre